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Le vacarme avait maintenant pris fin.

Des volutes de fumée grise, semblables à de minces écharpes de brume, s’élevant de la terre torturée, planaient au-dessus des palissades déchiquetées, des pêchers que l’artillerie avait réduits à l’état de cure-dents. Le silence, sinon la paix, était retombé sur ces quelques kilomètres carrés de terre où les hommes s’étaient battus.

Là, pendant un temps interminable, d’un horizon à l’autre, le tonnerre avait régné en maître. Des geysers de poussière avaient jailli vers le ciel. Aux hennissements des chevaux se mêlaient les cris gutturaux des hommes, le sifflement des projectiles ponctué de sourdes conflagrations quand ils arrivaient au terme de leur trajectoire. L’éclat meurtrier des rafales se mariait au scintillement de l’acier tandis que, dans le vent, claquaient les bannières multicolores.

Puis tout s’était tu. Et c’était, à présent, le silence.

Mais un silence anormal. Un silence rompu par les plaintes des blessés, par le gémissement des hommes que dévorait la soif, par les prières des agonisants qui imploraient la mort – des pleurs, des appels, des sanglots qui s’éterniseraient pendant des heures sous le chaud soleil de l’été. Enfin, les formes convulsées finiraient par se taire ; elles se figeraient, immobiles, tandis que monterait une odeur qui soulèverait le coeur des passants. Peu profondes seraient les tombes.

Les blés ne seraient jamais moissonnés. Au retour du printemps, les arbres ne fleuriraient point. La pente qui s’étirait jusqu’au faîte de la crête était hantée de mots informulés, d’actions avortées. Un désert où la mort hurlait de sa voix de silence.

Des noms pleins de fierté, mais qui n’étaient plus que des sonorités creuses dont l’écho retentirait dans les siècles à venir  – la Brigade de Fer, le 5e du New Hampshire, le Ier du Minnesota, le 2e du Massachusetts, le 16e du Maine...

Et Enoch Wallace.

Il étreignait encore son fusil faussé ; ses mains étaient hérissées d’échardes et son visage était noir de poudre. Une gangue de boue et de sang recouvrait ses chaussures.

Il vivait encore.

 

Le Dr Erwin Hardwicke fit rouler son crayon entre ses paumes d’une manière exaspérante. Songeur, il dévisagea l’homme assis en face de lui.

— Ce que je ne comprends pas, dit-il, c’est la raison pour laquelle vous venez nous trouver.

— Vous êtes l’Académie nationale et j’ai pensé que...

— Mais vous, vous êtes les services de Renseignement !

— Ecoutez, docteur... si cela vous met plus à l’aise, nous pouvons appeler cela une visite officieuse. Disons que je suis un simple citoyen qui, se trouvant au pied du mur, s’est adressé à vous dans l’espoir que vous pourrez l’aider.

— Ce n’est pas que je refuse de vous aider. Seulement, je ne vois pas comment. Cette histoire est tellement vague, tellement hypothétique...

— Mais, nom d’un chien, il existe des preuves ! s’exclama Claude Lewis. Il y a quand même quelques petits faits que j’ai réunis et que vous ne pouvez pas nier.

— Soit. Recommençons une fois de plus depuis le début et reconstituons toute cette affaire élément par élément. Vous affirmez que vous avez repéré ce bonhomme ?

— Il s’appelle Enoch Wallace. Chronologiquement, il est âgé de cent vingt-quatre ans. Il est né dans une ferme située à quelques kilomètres de la ville de Millville, dans le Wisconsin. Le 22 avril 1840. Fils unique de Jedediah et Amanda Wallace. Quand Abraham Lincoln lança son appel aux volontaires, il fut parmi les premiers à s’engager. Il faisait partie de la Brigade de Fer qui fut virtuellement anéantie à Gettysburg en 1863. Mais Wallace parvint, on ne sait comment, à se faire muter dans une autre unité et il combattit en Virginie sous les ordres de Grant. Il était à Appomattox à la fin de la guerre de Sécession.

— Vous avez fait les vérifications d’usage ?

— J’ai examiné son dossier. Nous sommes en possession de son acte d’engagement. La pièce se trouve à Madison. Les autres documents, y compris ses papiers de démobilisation, sont ici, à Washington.

— Et vous dites qu’il a l’air d’avoir trente ans ?

— Pas un jour de plus. Et on le croirait même plus jeune encore.

— Mais vous ne lui avez pas parlé.

Lewis fit non de la tête.

— Il ne s’agit peut-être pas du même homme. Si vous aviez ses empreintes digitales...

— A l’époque de la guerre de Sécession, dit Lewis, on ne connaissait pas les empreintes digitales.

— Cela fait plusieurs années qu’est mort le dernier vétéran de la guerre de Sécession, reprit Hardwicke. C’était un Confédéré qui avait servi comme tambour, si je me souviens bien. Il y a sûrement une erreur quelque part.

— C’est ce que je pensais moi-même quand on m’a chargé de cette affaire.

— Mais pourquoi cette mission ? Pourquoi les Renseignements se trouvaient-ils mêlés à cette histoire ?

— Je reconnais que c’est un peu insolite. Mais les implications d’une telle affaire sont si importantes...

— Le problème de l’immortalité... C’est à cela que vous songez ?

— Euh... oui... cela nous a peut-être bien traversé l’esprit. Mais ce n’est là qu’un aspect secondaire des choses. Il y avait d’autres considérations. C’était un phénomène étrange méritant qu’on y plonge un peu le nez.

— Mais les Renseignements...

Lewis grimaça un sourire.

— Pourquoi les Renseignements et non une équipe d’hommes de science ? C’est cela que vous voulez dire ? Je suppose que, logiquement, une équipe scientifique eût été toute désignée. Mais c’est un de nos agents qui a levé le lièvre. Il passait son congé dans le Wisconsin où il avait des parents et il a entendu des bruits – rien que de vagues rumeurs, de simples commérages. Il a cherché à s’informer. Il n’a pas découvert grand-chose. Suffisamment, cependant, pour penser qu’il y avait peut-être bien là, quelque chose à approfondir un tant soit peu.

— C’est bien ce qui m’intrigue, dit Hardwicke. Comment un individu peut-il atteindre l’âge de cent vingt-quatre ans sans devenir une célébrité dont le renom franchit les limites de son village ? Cela devrait se savoir universellement. Imaginez la publicité que la presse serait capable de donner à un tel événement !

— Rien que d’y penser, j’en ai des frissons.

— Comment ce silence est-il concevable ?

— C’est malaisé à expliquer. Il faut connaître cette région et ceux qui l’habitent. Le sud-ouest de l’Etat du Wisconsin est borné par deux fleuves, le Mississippi à l’ouest et le Wisconsin au nord. A l’intérieur le pays est plat : la prairie, une terre riche, des fermes et des villes prospères. Mais, dans la zone des cours d’eau, le terrain est accidenté : de hautes collines, des à-pics, des ravins profonds, des falaises escarpées. Il y a là des enclaves isolées, coupées du reste du monde. Le réseau routier est insuffisant et les petites fermes rudimentaires abritent des gens plus proches de l’âge des pionniers que du XXe siècle. Evidemment, ils ont des voitures, ils ont la radio et, un jour, ils auront sans doute aussi la télévision. Mais, intellectuellement parlant, c’est une population rétrograde où l’esprit de clan est encore très vif. Tous les gens ne sont pas comme cela, évidemment. Je dirai même qu’il ne s’agit en fait que d’une minorité. Néanmoins, il existe des îlots isolés.

 » Autrefois, dans ces enclaves, il y avait un grand nombre d’exploitations agricoles mais, de nos jours, on ne peut guère gagner sa vie dans ces petites fermes. Les conditions économiques déterminent un lent exode. Les fermiers vendent leurs terres au plus offrant et s’en vont. Ils s’installent surtout dans les villes où il est plus facile de gagner son pain.

Hardwicke hocha la tête.

— De sorte que, bien entendu, ceux qui restent sont les plus arriérés, les plus attachés à l’esprit de clan ?

— Exactement. A l’heure qu’il est, la quasi-totalité des terres est détenue par des propriétaires absentéistes qui ne feignent même pas de la travailler. A la rigueur, ils peuvent élever quelques têtes de bétail mais cela ne va pas plus loin. Sur le plan fiscal, c’est une solution qui présente un certain intérêt : une grande partie des biens fonciers est hypothéquée à l’heure actuelle.

— Que cherchez-vous à m’expliquer ? Que la population rétrograde du Wisconsin pratique la conspiration du silence ?

Lewis hésita.

— La formule est un peu brutale. C’est plutôt sa façon d’être. Un vestige de la mentalité des pionniers d’antan. On ne s’occupe pas des affaires d’autrui. On n’aime pas qu’on vienne vous embêter et on n’embête pas le voisin. Si un gars prétend vivre dix siècles, c’est peut-être prodigieux, mais ça le regarde. Et s’il a envie d’être seul et qu’on lui fiche la paix, eh bien, ce sont ses oignons. Les gens en parlent peut-être entre eux. Mais seulement entre eux. Si un étranger cherche à mettre les pieds dans le plat, ils sont furieux.

 » Je suppose que, au bout de quelque temps, ils se sont habitués à l’idée que Wallace restait jeune tandis qu’ils vieillissaient, eux. Et les nouvelles générations ont accepté le fait parce que les aînés l’admettaient tout naturellement. D’ailleurs, ce Wallace se montre assez peu. Il vit dans un isolement rigoureux.

 » Et, dans les environs, cette histoire, lorsque du moins on y pensait, faisait l’effet d’un de ces trucs invraisemblables ne méritant même pas qu’on s’en inquiète. On n’y voyait qu’un canular et celui qui aurait cherché à aller au fond des choses se serait couvert de ridicule, voilà tout.

— Pourtant, votre agent a enquêté.

— Oui. Mais ne me demandez pas pourquoi.

— On ne l’a pas chargé de suivre l’affaire ?

— Il a reçu une autre mission. On avait besoin de lui ailleurs. N’importe comment, il était connu dans le coin.

— Et vous ?

— Il y a deux ans que je suis branché là-dessus.

— Mais, à présent, vous êtes au courant ?

— Pas entièrement. Nous nous posons plus de questions aujourd’hui qu’au début.

— Vous avez vu ce Wallace ?

— A plusieurs reprises mais je ne lui ai jamais adressé la parole et je ne crois pas qu’il m’ait jamais vu. Tous les jours, avant d’aller chercher son courrier, il fait une petite promenade. C’est que, voyez-vous, il ne s’absente jamais. Le facteur lui apporte tout ce dont il a besoin : un sac de farine, une livre de lard, une douzaine d’oeufs, des cigares, parfois un peu d’alcool.

— C’est absolument contraire aux règlements postaux !

— Certes, mais il y a des années que le préposé lui rend ce service. Les facteurs sont sans doute les seuls amis qu’il ait jamais eus.

— Si je vous suis bien, votre Wallace ne s’occupe guère d’agriculture.

— Il a un petit potager où il fait pousser quelques légumes mais ça s’arrête là. Son domaine est en friche.

— Il faut pourtant bien qu’il vive. Il doit certainement avoir une source de revenus.

— Oui. Tous les cinq ans ou tous les dix ans il expédie des pierres précieuses à New York.

— C’est légal ?

— Vous pensez à une histoire de recel ? Non, je ne crois pas. Si l’on voulait fourrer son nez là-dedans, je suppose que la justice y aurait son mot à dire, certes. Ce n’est pas très légal. Il n’en allait pas ainsi à l’époque où il s’est lancé dans ce trafic. Mais les lois changent et j’ai la conviction que le vendeur et l’acheteur contreviennent à une foule de règlements.

— Et vous n’attachez pas une importance particulière à ce genre de transaction ?

— Bien sûr que si ! J’ai interrogé les dirigeants de la société à laquelle il fait ses envois. Je les ai d’ailleurs trouvés assez mal à l’aise. En premier lieu, ils volent l’ami Wallace comme au coin d’un bois. Je leur ai dit de continuer de faire affaire avec lui et de me prévenir immédiatement si quelqu’un s’amenait pour leur poser des questions. Et je leur ai recommandé de la boucler et de faire comme si de rien n’était.

— Vous ne voulez pas effrayer le bonhomme, hein ?

— Tout juste. Je tiens à ce que tout demeure comme s’il n’y avait pas anguille sous roche. Et ne me demandez pas d’où proviennent ces pierres : je n’en sais rien.

— Peut-être est-il propriétaire d’une mine.

— Eh bien, ce doit être un drôle de filon ! Des diamants, des rubis, des émeraudes... Ce serait une mine où l’on trouverait vraiment de tout, mon cher.

— Même s’il se fait arnaquer, ça doit lui rapporter un joli paquet.

Lewis acquiesça.

— Il semble qu’il ne négocie ses cailloux que quand il est à court d’argent. Il a peu de besoins. Et, à en juger d’après ses achats alimentaires, il vit sur un pied des plus modestes. Cependant, il est abonné à quantité de journaux et de magazines, sans compter des dizaines de revues scientifiques. Et il achète des livres à la pelle.

— Quel genre de livres ? Des manuels techniques ?

— En partie, bien sûr. Mais surtout des bouquins consacrés aux disciplines en plein développement. Physique, chimie, biologie – rien que des machins comme ça.

— Mais je ne...

— Dame ! Moi non plus ! Ce n’est pas un savant. Il n’a même pas eu de formation scientifique. A l’époque où il fréquentait l’école, la science avait la portion congrue. Et l’éducation scientifique de l’époque n’avait guère de points communs avec celle d’aujourd’hui. D’ailleurs, ce qu’il aurait pu acquérir comme connaissances en ce domaine n’aurait plus guère de valeur à l’heure actuelle. D’après nos renseignements, c’était néanmoins un adolescent brillant.

Hardwicke hocha la tête.

— Cela paraît incroyable. Vous avez vérifié tout cela ?

— J’ai fait de mon mieux. Il a fallu agir avec beaucoup de prudence pour ne pas éveiller les soupçons. Ah... j’oubliais un détail : il écrit énormément. Il achète de gros registres à la douzaine. Et il commande son encre par bouteilles d’un litre.

Hardwicke se leva et se mit à faire les cent pas dans la pièce.

— Si vous ne m’aviez pas montré les documents vous accréditant et si je ne les avais pas épluchés, Lewis, je penserais qu’il ne s’agit là que d’une farce de mauvais goût.

Il reprit place derrière son bureau et commença à faire rouler son crayon entre ses paumes.

— Il y a deux ans que vous enquêtez, reprit-il. Vous n’avez pas trouvé d’explications ?

— Pas une. Je suis complètement dans l’impasse. C’est pour cela que je suis venu vous trouver.

— Parlez-moi de lui. Qu’a-t-il fait après la guerre de Sécession ?

— Quand il en est revenu, sa mère était morte. Elle était enterrée à côté de la ferme. C’était la coutume, en ce temps-là. Les choses se passaient entre voisins. Wallace a eu un congé mais il est arrivé trop tard. On ne se déplaçait pas rapidement à l’époque. Alors, il a rejoint son unité. Pour autant qu’on le sache, ce fut la seule permission dont il n’ait jamais bénéficié. Son père, à partir de ce moment, vécut seul et s’occupa seul de sa ferme. Très bien, d’ailleurs. D’après mes informations, c’était un agriculteur remarquablement doué. Il était abonné à diverses gazettes spécialisées et avait des idées révolutionnaires. Il s’intéressait à des choses comme la rotation des cultures et l’érosion des sols. En fonction de nos critères modernes, son exploitation laissait évidemment à désirer ; n’empêche qu’elle lui permettait de vivre et même de mettre un peu d’argent de côté.

 » Après la guerre, Enoch travailla avec lui pendant un an ou deux. Le père acheta une faucheuse – un engin à traction animale avec une lame qui coupait le foin ou les épis. C’était son côté progressiste. L’engin faisait beaucoup plus de travail qu’une simple faux.

 » Un soir, le bonhomme s’en fut faucher un pré. Les chevaux s’emballèrent. Quelque chose les avait sans doute effrayés. Toujours est-il que le père Wallace fut précipité en bas de son siège. Il tomba juste devant la lame. Une mort atroce...

Hardwicke fit une grimace.

— Horrible, murmura-t-il.

— Enoch ramena le corps de son père à la ferme. Puis il prit un fusil et partit à la recherche des chevaux. Il les retrouva à la limite du champ, les abattit tous les deux et les laissa là où ils étaient tombés. Il les y laissa... à la lettre : leurs squelettes restèrent des années dans le pré à l’endroit où il les avait tués. Toujours attelés à la faucheuse. Jusqu’à ce que les harnais pourrissent.

 » Sa vengeance accomplie, Enoch rentra à la maison. Il fit la toilette du mort, le revêtit de son complet des dimanches, l’allongea sur une planche et se rendit dans le hangar où il confectionna un cercueil. Ensuite, il creusa une fosse près de la tombe de sa mère. Il termina son ouvrage à la lueur d’une lanterne. Puis il veilla le défunt. Au matin, il alla prévenir son voisin le plus proche, qui annonça la nouvelle à d’autres. Quelqu’un alla quérir un prêtre. Les funérailles eurent lieu à la fin de l’après-midi. Depuis, Enoch est resté cloîtré dans la ferme. Il n’a jamais travaillé la terre. A l’exception de son potager, bien sûr.

— Vous me disiez tout à l’heure que les gens du pays n’étaient pas bavards. Il me semble que vous en avez quand même appris pas mal sur le compte de votre ermite.

— Il m’a fallu deux ans pour cela. Je me suis infiltré au sein de la population locale. J’ai acheté une vieille guimbarde et je me suis rendu à Millville où j’ai laissé entendre que je cherchais du ginseng.

— Du quoi ?

— Du ginseng. C’est une plante.

— Oui, je sais. Mais il y a belle lurette qu’il n’existe plus de marché pour le ginseng.

— Si, il y a encore un marché limité et occasionnel. On trouve à en exporter un peu. Mais je cherchais également d’autres plantes médicinales et prétendais les connaître à fond, elles et leur usage. Je ne faisais d’ailleurs pas que prétendre : j’avais sérieusement potassé la question.

— Vous jouiez les âmes simples, quoi ? Une chose que les indigènes pouvaient comprendre. Une sorte de régression atavique, en quelque sorte. Et, de surcroît, vous faisiez figure de personnage inoffensif. Un type qui avait peut-être un petit grain...

Lewis fit oui de la tête.

— Cela a même mieux marché que je ne l’espérais. Je me baladais un peu partout et les gens me parlaient. J’ai même trouvé du ginseng. Je suis tombé en particulier sur une famille, les Fisher. Ils habitent près de la rivière, juste en dessous de la ferme Wallace qui est perchée tout en haut d’un escarpement. Ils sont installés là depuis aussi longtemps que les Wallace, ou presque, mais ce sont des gens d’un tout autre acabit : ça chasse le raton laveur, ça pêche le poisson-chat, ça fait de la distillation clandestine, le tout en famille. Je leur ai donné l’impression d’être de la même race qu’eux. J’étais aussi flemmard et aussi insignifiant. Je leur donnais un coup de main pour l’alcool. Pour le fabriquer et pour le boire. Et, de temps à autre, je les aidais quand ils faisaient un peu de colportage. Je péchais avec eux. Ils m’ont indiqué un ou deux endroits où poussait le ginseng. Pour un sociologue, les Fisher seraient probablement une mine d’or. Il y a une fille, sourde et muette mais belle comme un ange ; elle a le don de guérir les verrues.

— Je connais ce genre de créatures. Je suis né et j’ai été élevé dans les montagnes du Sud.

— Ce sont eux qui m’ont parlé de la faucheuse et des chevaux. Un jour, je me suis rendu jusqu’au pré et j’ai creusé. J’ai trouvé un crâne de cheval et divers ossements.

— Mais étaient-ce bien les restes des bêtes de Wallace ?

— Peut-être pas. Seulement, j’ai également exhumé une partie de la faucheuse. Il n’en restait pas grand-chose. Assez toutefois pour l’identifier.

— Revenons à votre histoire. Après la mort de son père, Enoch est donc demeuré à la ferme. Il ne l’a jamais quittée ?

Lewis hocha la tête.

— Il y habite toujours. Rien n’y a changé. Et la maison n’a apparemment pas davantage vieilli que l’homme.

— Vous y êtes entré ?

— J’y suis allé. Mais je n’y ai pas pénétré. Je vais vous expliquer comment cela s’est passé.

JaiLu 847 - Au carrefour des étoiles
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